έποχή سمت


Descendre la Veveyse jusqu’à sa fin. Devant, le lac, soit le rien. Marcher ainsi dans le brouillard, avancer vers ce rien, cette fin ; avancer jusqu’à disparition des repères. Déjà, derrière moi, le passé s’est effacé dans le brouillard. La perception de ma situation présente, les côtés se brouillent et disparaissent. Ne reste que le devant, l’à venir, jusqu’à ce qu’aussi le brouillard l’absorbe. Aller ainsi jusqu’à la fin du monde, jusqu’au rien. Lever les yeux, être dans le rien, non le dernier homme au monde, mais l’homme sans monde. Mettre hors-jeu : έποχή phénoménologique, mise entre parenthèses du monde objectif. Ceci ne me place pas devant un pur néant. Ce qui, en revanche et par là même devient mien, à moi sujet méditant, c’est ma vie pure.

Si je garde ce qui, par la libre έποχή à l’égard de l’existence du monde empirique, s’offre à mon regard à moi, sujet méditant, je saisis un fait significatif : c’est que moi-même et ma vie demeurent intacts quoi qu’il en soit de l’existence ou de la non-existence du monde, et quel que puisse être le jugement que je porterai sur ce sujet.


Texte et liens, Vevey, 1.04.2022